vendredi 29 mars 2024

Rencontre avec des Cosaques dans le port de Vannes

Avant de devenir les meilleurs cavaliers du monde, les Cosaques furent des marins et des hommes de l’eau, comme en témoignent les noms de leurs communautés, toutes baptisées en hommage aux grands fleuves sur lesquels ils étaient positionnés : le Don, la Volga, le Yaïk, le Terek, le Kouban, l’Amour ou l’Oussouri. En dignes héritiers de leurs ancêtres varègues, ils étaient pirates autant que pêcheurs, exploitant les milliers de cours d’eau qui parsèment le pays et dévalisant les villes côtières en s’aventurant jusqu’en mer Noire et en mer Caspienne.

La tactique des Cosaques, elle aussi, était proche de celle des flibustiers : axée sur la surprise et la frayeur, elle jouait avant tout sur la réputation de barbares dont les Cosaques bénéficiaient – et qu’ils prenaient soin d’alimenter -, ainsi que sur la rapidité de leurs embarcations, les tchaïkas, légères et maniables. Ces grandes barques sans quille n’étaient d’ailleurs pas sans rappeler les drakkars vikings, ces formidables navires capables de fendre les vagues en haute mer comme de glisser en silence dans des rivières peu profondes.

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De faible tirant d’eau, les tchaïkas permettaient aux Cosaques de se cacher parmi les roseaux des estuaires et de surgir de nulle part pour effectuer leurs coups de force. Très maniables, dirigées grâce à des perches de direction à l’avant et à l’arrière, elles étaient idéales pour se retirer en un éclair dans les multiples cours d’eau qui striaient l’embouchure du Dniepr.

À la veille d’une expédition, chaque tchaïka était remplie de vivres et regroupait une cinquantaine d’hommes bien armés, qui, particulièrement vigoureux aux avirons, étaient capables de battre de vitesse les galères turques… À l’instar des flibustiers, les Cosaques passaient de longues heures à observer de loin leur future proie, estimant ses moyens de défense et s’approchant dans le silence de la nuit le moment venu. Ce n’est qu’à l’aube, profitant au maximum de l’effet de surprise, qu’ils lançaient enfin leur assaut. Mais avant cela, leur technique était de décimer les troupes adverses par un feu nourri de leurs meilleurs tireurs, à qui l’on passait des armes rechargées pour leur permettre de tirer en continu. Une fois la victoire acquise, le butin était transporté à bord et les Cosaques repartaient se dissimuler dans les hauts-fonds, inaccessibles aux gros navires.

Hantant le littoral de la mer Noire et de la mer d’Azov, les flottes cosaques firent la loi dans la région durant tout le XVIIe siècle, semant la panique jusqu’à Constantinople et sur les bords du Danube. Sortant en bandes d’une centaine de tchaïkas, les Zaporogues, puis les hommes du Don, donnèrent des cauchemars aux Turcs et au khanat de Crimée.

Mais ces expéditions n’avaient pas pour seul but la piraterie et bien souvent elles tournaient en guerres rangées, lançant les Cosaques dans de véritables combats navals avec objectifs militaires et les Ottomans les craignaient plus que tout autre adversaire.

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La marine fut donc un atout de taille pour le renforcement des communautés cosaques, qui purent ainsi capitaliser du butin et défendre leurs territoires face aux armées ennemies. Mais la maîtrise de la navigation par les Cosaques ne leur servit pas qu’à pratiquer la piraterie ou faire la guerre, elle leur permit aussi de développer la pêche, qui devint bientôt leur principale activité économique, puis à conquérir des terres vierges, comme en Sibérie et en Extrême-Orient. Plus tard, avec l’avènement des divers voïskos, c’est la cavalerie qui prédominera dans les armées cosaques, mais la marine zaporogue continuera de se déployer sur le Dniepr.

Philip LONGWORTH (1972)

En ce moment, une réplique de ces navires est ancrée dans le port de Vannes. Construit en 1992 en Ukraine, à Lviv, le navire de 20 mètres de long, navigue depuis 17 ans. J’ai rencontré son capitaine Hryhoriy (prononcez Grégory) KOZIY : « On faisait partie d’une association cosaque qui reproduisait des armes et des costumes traditionnels. On voulait construire un bateau. Et quand il a été construit, on s’est dit : pourquoi ne pas naviguer avec ? » Deux ans furent nécessaires pour bâtir cette galère à voile carrée, inspiré des knörrs vikings. A l’époque une quarantaine de jours seulement suffisaient.

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Stéphane GAUDIN
Stéphane GAUDINhttp://www.theatrum-belli.com/
Créateur et directeur du site THEATRUM BELLI depuis 2006. Chevalier de l'Ordre National du Mérite. Officier de réserve citoyenne Terre depuis 2018 (LCL), rattaché au 35e régiment d'artillerie parachutiste de Tarbes. Officier de réserve citoyenne Marine de 2012 à 2018 (CC). Membre du conseil d'administration de l'association AD AUGUSTA et de l'Amicale du 35e RAP.
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