jeudi 28 mars 2024

HISTOIRE : Chronique culturelle du 27 mai

27 mai 1876 : Naissance de Ferdynand Antoni Ossendowski, écrivain, géologue, universitaire et militant polonais, lauréat de l’Académie française


27 mai 1905 : bataille navale de Tsushima (entre le Japon et la Russie).

La situation militaire de la Russie en guerre contre le Japon se dégradant en Extrême-Orient, Nicolas II décide l’envoi d’une escadre de secours (4 cuirassés à peine achevés, 11 cuirassés et croiseurs anciens ou hors d’âge, 9 destroyers). Partie de la Baltique, aux ordres de l’amiral Rojdestvenski, l’escadre parvient à l’entrée du détroit de Corée en vue de l’île de Tsushima le 27 mai 1905, après un périple de sept mois de navigation épuisante pour contourner l’Afrique puis traverser l’océan Indien et les mers de Chine. Elle est attendue par l’amiral Tōgō avec 4 cuirassés, 8 croiseurs cuirassés, 14 croiseurs et 21 torpilleurs. Le tir japonais, très précis, disloque les trois lignes russes. En quelques heures, les quatre cuirassés de tête sont mis hors de combat. Rojdestvenski, blessé, est fait prisonnier. Son remplaçant Nebogatov capitule avec les rares bâtiments rescapés le 28 mai au matin. Seuls un croiseur et deux destroyers rallieront Vladivostok. Le reste de l’escadre russe est coulé, capturé ou interné. Les Russes comptent 5 000 morts, 6 000 prisonniers et 700 blessés, contre seulement 600 hommes mis hors de combat pour les Japonais. Cette victoire japonaise eut un grand retentissement à l’époque en Asie et fit entrer le Japon dans le cercle des grandes puissances maritimes.


27 mai 1913 : naissance de Jesse Glenn Gray (Pennsylvanie).

Écrivain et philosophe américain qui effectue la Seconde guerre mondiale dans le contre-espionnage durant les campagnes d’Italie et de France. Auteur du désormais classique « Au combat – Réflexions sur les hommes à la guerre« , il dresse un portrait fin et émouvant de l’homme confronté à la peur et la violence, présentant avec une grande clarté ses pensées sur la mort, le courage, la lâcheté, l’ennemi, la culpabilité, la fraternité, le sacrifice,… Gray écrit 10 ans après la guerre en s’appuyant sur les notes prises à l’époque. La force de son témoignage de « soldat » est intacte, gagnant même en profondeur grâce à l’analyse rétrospective du philosophe. Comme Ernst Jünger, il avoue une fascination involontaire pour le déchaînement de la puissance mais, tout en n’étant pas un rêveur irresponsable, dénonce aussi l’absurdité de l’homme qui tue l’homme .


27 mai 1916 : mort à 67 ans du général Joseph Gallieni, dont le corps est exposé aux Invalides et devant lequel les Parisiens se pressent en foule. Il sera fait maréchal de France en 1921 à titre posthume.


27 mai 1918 : Ludendorff attaque au chemin des dames.

Après les échecs dans ses tentatives de percée du front occidental en Artois et dans la Somme, Ludendorff lance son ultime attaque dans la région du Chemin des Dames, théâtre de la coûteuse offensive Nivelle un an plus tôt. Les Stosstruppen (troupes d’assaut) reprennent en un jour le terrain conquis en un an par les Français et ne seront arrêtés que sur la Marne à la fin du mois, grâce à l’engagement précipité des premières unités américaines : c’est le « Caporetto » de la France.


27 mai 1919 : arrivée de la première transat en avion (Lisbonne).

Le commandant Albert Cushion Read de la marine américaine pose son hydravion, un Curtis NC4, dans le port de Lisbonne accomplissant la première traversée de l’Atlantique de l’histoire de l’aviation. Parti le 16 mai de Terre Neuve, il fait une escale de quelques jours à Horta dans les îles des Açores. La première traversée sans escale fut quant à elle réalisée par les Britanniques Alcock et Whitten les 14 et 15 juin suivants à bord d’un bombardier Vicker Vimy.


27 mai 1922 : Naissance d’Otto Carius,

connu pour avoir été crédité par la Wehrmacht de la destruction de plus de 150 chars, ce qui en fait le deuxième destructeur de char de la Panzerwaffe, après Kurt Knispel. Son palmarès a principalement été acquis sur le Front de l’Est au sein de la Schwere Panzer-Abteilung 502. Il est décède le  à l’âge de 92 ans.


27 mai 1926 : reddition d’Abd el Krim.

Le chef rebelle et auto-proclamé de la « République du Rif », en guerre contre l’Espagne et la France au Maroc, se rend après 5 ans de combats. Il met ainsi fin à la guerre du Rif.


27 mai 1941 : la fin du Bismarck. (Atlantique Nord).

Poursuivi depuis son repérage au nord de l’Islande, après avoir coulé le HMS Hood le 24 mai (seulement 3 survivants parmi l’équipage), le puissant cuirassé allemand Bismarck est coulé avec ses 2200 membres d’équipage (110 survivants). La Kriegsmarine va désormais éviter d’exposer au même sort son navire jumeau: le Tirpitz.


27 mai 1942 : opération commando contre Heydrich (Prague).

Un commando de parachutistes tchèques, ayant fui l’invasion allemande en France puis au Royaume-Uni, est largué d’un Halifax au-dessus de la Tchécoslovaquie entre décembre 1941 et mars 1942. Après avoir repéré les habitudes du « boucher de Prague », ils lui tendent une embuscade en pleine ville. Mortellement blessé par des éclats de grenades, Heydrich décède le 4 juin. Chef du RSHA (regroupant tous les services spéciaux), il était le bras droit d’Hitler et de Himmler pour la « solution finale ». La témérité de l’action qui lui coûte la vie exaspère Hitler qui décide une série de représailles particulièrement sanglantes contre la population. Le commando bénéficie de la protection d’une écrasante majorité de Tchèques mais est trahi par un des siens, appâté par la récompense de 10 millions de couronnes. Les paras tchèques retranchés dans une crypte orthodoxe, se battent jusqu’au bout, se réservant leur dernière cartouche.


27 mai 1944 : bombardement de Marseille, Nice, Avignon et Nîmes.

250 bombardiers américains volant à haute altitude bombardent les nœuds ferroviaires des grandes agglomérations du Sud-Est dans le cadre de la préparation du débarquement en Provence (opération Dragoon – Août 1944). A Marseille, le bombardement met fin — involontairement — à une grève de 10 000 ouvriers dirigée par la résistance communiste locale et tue près de 1800 civils.


27 mai 1952 : signature de la CED (Paris).

Acte de naissance de la Communauté européenne de Défense, le traité de Paris est signé par la RFA, la Belgique, le Luxembourg, l’Italie, les Pays-Bas et la France mais ne sera jamais ratifié par cette dernière alors que l’impulsion initiale du projet est française.


27 mai 1995 : reprise du poste de Vrbanja. (Sarajevo).

La section Heluin du BATINF 4, déployé au centre de Sarajevo (constitué autour d’un noyau du 3e RIMa), reprend le poste tenu par le bataillon au débouché du pont de Vrbanja, capturé traîtreusement le matin même par des paramilitaires serbes de Bosnie. C’est la première action résolument offensive de la FORPRONU. Deux soldats sont tués au cours de l’opération commandée par le capitaine Lecointre. La section est montée à l’assaut dans des conditions contraignantes (pas d’appui lourd pour éviter les dommages collatéraux dans ce quartier très peuplé). 

Le BATINF 4 est aux ordres du colonel Erik Sandhal, chef de corps du RICM qui constitue le noyau du bataillon avec le 4e escadron (HOT) en compagnie d’infanterie sur VAB, la CCL et le 3e escadron (capitaine Labuze). Le 3e RIMa fournit la compagnie Lecointre (au moins une compagnie). Bien que les consignes d’ouverture du feu soient draconiennes, l’escadron ERC90 du capitaine Labuze en appui de l’assaut fait taire presque tous les tirs des immeubles jouxtant le poste grâce aux tirs du peloton Mizon.

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Extrait de Sous le feu – La mort comme hypothèse de travail, de Michel Goya

Sarajevo 27 mai 1995, 08 H 45

La France est présente depuis 1992 au cœur des conflits consécutifs à l’éclatement de l’ex-Yougoslavie. Deux bataillons français de Casques bleus sont alors présents dans la ville de Sarajevo assiégée par les forces Bosno-Serbes. Dans la nuit du 26 au 27 mai, une unité bosno-serbe s’empare par surprise d’un des postes du bataillon implanté dans la vieille ville. L’ordre est immédiatement donné de le reprendre par un assaut afin de libérer les prisonniers Français qui y sont gardés et de montrer la détermination de la France.

Je suis le lieutenant Héluin, je suis en tête de la première section des Forbans du 3e Régiment d’infanterie de marine et je marche vers mon objectif à travers les ruelles qui bordent le cimetière juif en direction du pont de Verbanja. J’ai reçu ma mission, il y a un peu plus d’une heure. Elle est très simple : reprendre le poste français près du pont.

Mon idée est d’attaquer simultanément les trois petits bunkers qui composent le poste avec un groupe de trois binômes pour chaque objectif. Chaque binôme, qui comprend un homme qui connaît le poste et un autre qui ne le connaît pas, à un point d’arrivée précis. J’ai laissé mon adjoint en arrière avec les véhicules, les tireurs d’élite dont un avec un fusil Mac Millan de 12,7mm et les tireurs antichars. Sa mission consiste à nous appuyer depuis les hauteurs. Lorsque je lui ai donné cet ordre, il m’a regardé, désespéré :« mon lieutenant, vous pouvez pas me faire ça ! ». Le capitaine Lecointre nous accompagne pour gérer l’environnement de la section, en particulier l’appui des pelotons du RICM [Régiment d’infanterie et de chars de marine].

Guidés par un soldat bosniaque nous arrivons en vue du poste. Je regroupe la section. Pour franchir les barbelés, nous avions prévu deux portes, pauvre expédient à l’absence de matériel spécifique. Elles sont restées dans les véhicules.  Tant pis.  Nous ferons sans. Je regarde mes marsouins. Ils sont calmes et silencieux. Comme eux, je me sens étrangement serein. Il est vrai que depuis mon réveil, il y a trois heures, je n’ai pas eu une minute pour penser au danger. J’ai une confiance absolue dans mon chef et mes hommes. A mon signal, nous dévalons, baïonnette au canon dans la tranchée à une cinquantaine de mètres de l’objectif, appuyés d’abord par les tirs Bosniaques. Nous portons les équipements de protection pare-balles complets, les mêmes qui n’avaient été conçus que pour des missions purement statiques de garde. Certains de mes marsouins sont en treillis de cérémonie. Ils ne savaient pas, quelques heures plus tôt, que le point fort de la journée ne serait pas la prise d’armes prévue mais un assaut.

Je lance d’abord Le Couric et son groupe en direction de l’objectif le plus éloigné, le poste de garde Ouest. Je les vois courir puis s’arrêter devant les barbelés qui entourent le poste. Ils sont incapables de franchir et les coups commencent à pleuvoir depuis l’immeuble Prisunic qui les surplombe. Un obus de 90 mm frappe alors le bâtiment, suivi de rafales de 7,62 et de 20 mm en provenance des pelotons du RICM. Nous sommes désormais enveloppés d’une bulle de détonations, claquements, sifflements, impacts. Impuissant devant les barbelés, un marsouin regarde hébété sa cuisse perforée, un autre a deux doigts sectionnés. Une balle se loge dans son pare-cou. Ils resteront sur place, sans même de morphine, car elle a été retirée des trousses de premiers secours, pour éviter la toxicomanie. Deux autres gars sont vidés de toute énergie par la violence qui les entoure, ils sont comme des mannequins inertes. Le groupe est hors de combat. Mon plan a tenu deux minutes trente à l’épreuve des faits.

Je dois réagir immédiatement. Au lieu de s’emparer simultanément des trois points, on les nettoiera  successivement en commençant par le poste de sécurité à l’Est. Nous allons tous franchir les barbelés en face de nous, à 90 degrés de ceux qui ont arrêté le premier groupe mais au-delà d’un glacis de cinquante mètres dans l’axe de tirs des Serbes. Je m’élance en direction de la rivière Miljaca suivi par le deuxième groupe, tandis que les autres marsouins se déchaînent contre Prisunic, Mammouth et Center, les trois nids à snipers bosno-serbes. A ma gauche, Dannat, l’infirmier, s’effondre, le poumon perforé. Il se relève et marche vers l’arrière en croisant les regards des marsouins qui avancent, hypnotisés par le sang qui coule le long de son bras. Djaouti tombe à ma droite. Je suis maintenant face aux barbelés et malgré les douze kilos du gilet pare-balles, mon armement et mon inutile poste radio PP39, je parviens à franchir les barbelés suivi par mes hommes.

Nous nous trouvons au milieu de croisillons métalliques et obliquons vers la gauche en direction du poste. Il pleut alors des balles comme à Gravelotte. Mon cerveau est comme la focale d’un appareil photo. Je suis actuellement en mode « panorama ». Je me retourne et vois mes tireurs au fusil-mitrailleur Minimi enchaîner rafale sur rafale sur toutes les ouvertures de Prisunic. L’un d’entre eux, Coat, court vers un blessé pour lui prendre ses chargeurs Famas, mais comme ceux-ci ne vont pas sur les Minimi, il est obligé de retirer les cartouches une à une pour garnir ses « camemberts ». D’un seul coup, sa tête fait un mouvement étrange et il s’affaisse sur le côté.

Je poursuis ma route vers le merlon de terre qui protège l’entrée du poste. Je ressens le besoin d’ouvrir le feu mais mon Famas refuse obstinément de fonctionner. Je pense qu’il faudrait que je m’arrête pour y remédier mais que je n’ai pas le temps. A aucun moment il ne me vient à l’esprit que j’ai peut-être oublié d’armer mon fusil d’assaut. A côté de moi, Dupuch  s’arrête net : « je suis touché… ». Il s’observe pendant une seconde « non … c’est bon ! » et repart. Il a effectivement été touché mais la balle a traversé la gourde accrochée au ceinturon et est venue se loger dans sa lampe torche. Nous nous entassons sur le merlon de terre face à la porte d’entrée. Il y a quelques secondes, je fonctionnais en panoramique, maintenant plus rien n’existe hormis l’espace dans les barbelés par lequel je lance la grenade que me tend Dupuch. Explosion.

Je me lance baïonnette en avant, bien décidé à embrocher le premier Serbe qui se présentera dans le couloir. Les hommes sont collés à moi, deux par deux. Nous sommes à peine une dizaine, le tiers de l’effectif de départ. La section avec ses trois groupes s’est rapidement reconfigurée en un élément d’assaut, tiré par moi avec des binômes injectés au fur et à mesure dans l’action et un deuxième échelon, pour protéger les arrières et « nettoyer ». Un geste et Dupuch se lance dans le poste de garde Est, pendant que Llorente lance une grenade dans le couloir des WC. Humblot et Jego suivent, je les envoie sur le toit pour se mettre en appui. Nous poursuivons vers le deuxième conteneur qui nous servait de zone vie et qui forme le deuxième objectif. Delcourt s’avance dans le couloir mais une rafale en provenance du fond du poste le refoule. Je prends une grenade au capitaine Lecointre qui me suit et la lance derrière le rideau de la zone vie.

Lorsque je surgis devant ce qui nous servait de salle à manger, je vois un rideau de feu monter le long du mur du fond et glisser au-dessus de moi sur le plafond. Je hurle : « la bonbonne de gaz ! ». Depuch et Delcourt reculent précipitamment. Une fraction de seconde plus tard, j’entends une énorme explosion et je vois distinctement sur fond de flammes, un petit objet foncer vers moi. J’ai l’impression d’être dans une séquence de film au ralenti. Je prends un choc terrible à l’œil gauche et je suis projeté en arrière alors qu’un jet de sang part dans la direction opposée. Les hommes me regardent en hésitant et je baragouine ce que je crois être des ordres pour les empêcher de s’arrêter. J’ai encore le temps de dire au capitaine que je ne me sens pas bien avant de m’effondrer.

Je reprends mes esprits, quelques instants plus tard, réveillé par les impacts de balles sur les sacs à terre contre lesquels je suis assis. Je suis couvert de sang. Je me relève, sort du bâtiment du côté de la rivière Miljiaca. Une explosion me renvoie à l’intérieur.  Je suis comme une petite souris buttant contre des électrodes dans un labyrinthe. Mon cerveau fonctionne par éclipses. Je vois un marsouin posté face au dernier bâtiment tenu par les Serbes. « Qu’est-ce que tu fais là ? – C’est là que je devais être à la fin. » Dans le désordre général cet homme s’est raccroché à l’ordre que j’avais donné avant l’assaut. Je comprends alors que le capitaine a pris l’action à son compte et a entrepris d’éliminer les Serbes dans la pièce du fond puis de sauver les prisonniers français qui s’y trouvent. Avec la poignée d’hommes qui reste, il abat deux Tchetniks dont un lui sourit en disant « Français, bons combattants ! » mais les autres ont réussi à s’enfuir avec les prisonniers dans un poste voisin.

A la radio, j’appelle Cheick et lui ordonne d’envoyer un tireur d’élite et un tireur antichar. Je compte les placer face à l’immeuble. Je circule dans le poste ravagé. Je vais dans la zone vie, il y a trois prisonniers serbes, et un cadavre, serbe également, allongé au milieu. Le caporal-chef Jego, vient vers moi. Je remarque que sa gourde et un de ses porte-chargeurs sont perforés. Il a pris une rafale dans le « buffet ». Sa voix est cassée : « Humblot est encore sur le toit. Il est blessé et ne répond plus ». Je me place en appui face à l’immeuble qui nous surplombe tandis que Mandart et le capitaine Labuze descendent Humblot. Ils le déposent au pied de l’échelle au moment de l’arrivée du toubib. Celui-ci prend le pouls et me regarde au bout de quelques secondes : « Désolé mais pour lui, c’est fini. ».

Le combat est terminé. J’apprends qu’Amaru a été abattu par un tireur d’élite alors qu’il mitraillait les bâtiments depuis sa tourelle, non protégée, de VAB. Dix-sept autres marsouins sont blessés dont trois grièvement. Nous avons tué quatre Serbes dans le poste et fait quatre prisonniers. J’ignore le bilan des pertes ennemies dans les immeubles alentour. Nous récupérerons nos soldats prisonniers en les échangeant avec ceux que nous avons faits.

Errant dans les couloirs, en attendant la relève, je croise un caporal-chef qui me dit d’aller me faire soigner. Je me déplace vers le véhicule Sanitaire, criblé d’impacts, qui s’est posté devant l’entrée puis m’indigne : « ce n’est pas un caporal-chef qui va me donner des ordres ! » et je reviens sur mes pas. Le gars me voit et insiste « mon lieutenant, il faut vous faire soigner ! ». Je réponds « bon d’accord » et ressort. A l’extérieur, le sol est jonché des équipements qui ont été arrachés aux blessés pour leur donner les premiers soins et de chargeurs, dont beaucoup sont encore à moitié pleins. Beaucoup de gars profitaient de chaque moment de répit pour jeter leur chargeur entamé et en mettre un plein. Nous avons ainsi utilisé plus de 4000 cartouches en quelques dizaines de minutes sur une surface d’un hectare.

Vers 10h30, la section du lieutenant Provendier est là pour nous relever. Quelques minutes plus tôt, ils ignoraient même qu’un assaut avait eu lieu. Les hommes sont muets et ouvrent  de grands yeux en me voyant. Je pense : « aucun ne me salue, c’est quoi ce bordel ! ». J’amène Provendier à l’intérieur pour lui expliquer la situation. Je m’installe sur une table et commence à lui faire un croquis. Un cadavre Serbe est à mes pieds sans que cela me trouble le moins du monde. Mon sang tombe en goutte à goutte sur le croquis et lorsque je l’efface négligemment avec ma manche, je perçois que la situation n’est peut-être pas habituelle. Les consignes données, j’embarque dans les véhicules avec mes survivants en direction de la patinoire de Skanderja, notre base. Nous sommes hagards. A Skanderja, nous recevons des soins rapides puis vers 13 heures, je pars avec les autres blessés en direction du groupe médico-chirurgical de PTT Building, l’état-major de la force. Dès le contact avec le lit de l’hôpital, je m’effondre, épuisé.

Source : La voie de l’épée


27 mai 1999 : acte d’accusation de Milosevic.

Le Tribunal Pénal International poursuit le président de la République fédérale de Yougoslavie pour crimes de guerre et contre l’humanité commis au Kosovo. Il perd le pouvoir en octobre 2000 et est arrêté par la police serbe en avril 2001 après un assaut en règle de sa résidence.

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